« Au bord de l’eau », 水浒传 Shuǐhǔ Zhuàn, signifie littéralement « Le Récit des berges ». C’est un roman d'aventures tiré de la tradition orale, compilé et écrit sans doute par plusieurs auteurs, mais attribué à Shi Nai'an (XIVème siècle).
Ce roman raconte l’histoire de 108 « bandits » luttant contre la corruption du gouvernement et des hauts fonctionnaires de la cour de l'Empereur. De nombreuses versions existent et cette histoire est très célèbre.
Il est donc difficile de déterminer avec certitude qui est l'auteur / qui sont les auteurs du livre. La compilation originale en 100 chapitres est attribuée à Shi Nai'an, mais certains pensent que l’auteur serait plutôt Luo Guanzhong (auteur du Roman des Trois Royaumes). Shi Nai'an ne serait alors qu'un pseudonyme pour Luo Guanzhong ?
Une autre hypothèse dit que Shi Nai'an (dont l'existence n'est pas certaine), aurait écrit les 71 premiers chapitres, et son élève Luo Guanzhong, aurait rédigé les 29 suivants. Théorie du compromis ?
Bref, peut importe en réalité, car cela n’impacte en aucune façon l’intérêt de ces écrits.
Ce roman fait partie des quatre « Classiques » de la littérature chinoise à côté de « L’histoire des Trois Royaumes » (qui mérite aussi le détour !), du « Rêve dans le pavillon rouge » et de « La Pérégrination vers l’Ouest ».
L'ouvrage est la source d'innombrables expressions littéraires ou populaires et on retrouve souvent sous forme de pastiche, des scènes connues dans des publicités, des dessins animés, des clips vidéo.
PHOTO Xiao Long
De nombreuses adaptations télévisées du livre ont été réalisées en Chine et à Hong Kong tout comme au Japon où une série de jeux vidéo nommée « Suikoden » (Le récit des berges) a vu le jour. Car l'histoire des 108 bandits de Liangshan a connu un grand succès au Japon, où de nombreuses traductions et versions ont été éditées. Au fur et à mesure, les héros ont eu tendance d’ailleurs à être assimilés à des Japonais, mais on ne va pas … chinoiser !
Chez nous est sorti il y a déjà un moment le film « Les 108 Rois-Démons » qui prend aussi cette histoire pour toile de fond.
Un peu d’histoire :
Song Jiang, le chef des bandits, est un personnage historique, chef d'une rébellion sous les Song qui réussit à s'emparer de la capitale orientale, l'actuelle Kaifeng et de la Province du Hebei. Les troupes de l'Empereur mirent des années à le vaincre. Sa bande céda face à l'armée de l'empereur en 1121.
Bien qu'imprégnés de valeurs morales et d'un grand courage, ils sont poussés dans la clandestinité par les cadres corrompus de l'administration de l'époque (Song du Nord). Les 108 héros arriveront à obtenir une amnistie de l'empereur, chose que désire plus que tout leur leader Song Jiang. Ils se battront ensuite pour l'Empire, obtenant honneurs et la sympathie du peuple. Happy end donc !
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108 !
Cent-huit est un nombre important dans les croyances chinoises, et on le retrouve souvent. Le chapelet bouddhiste compte 108 grains. On sonne les cloches 108 fois, certains taolu traditionnels comportent 108 mouvements…C’est le nombre d'étoiles sacrées dans l’astrologie chinoise…. Les bandits les plus populaires de Chine ne pouvaient qu'être cent-huit.
Trente-six d'entre-deux sont liés aux astres célestes, ce sont les « meneurs » ; soixante-douze autres, moins puissants, sont liés aux astres terrestres, ce sont les forces « actives ».
Parmi les 36 premiers, on trouve : Tête de Léopard, la Licorne de Jade, Le Dragon Bleu, Le Pèlerin (Wu Song que nous connaissons bien puisque certains mouvements de Qi Gong Dao Yin Yang Sheng Gong le mentionnent dans leur nom !) et bien d’autres aux noms tout aussi évocateurs…
Parmi les 72 « lieutenants », on citera Le Général tacticien, Éventail de Fer, Moustaches pourpres…. Les exploits de chacun, leur rencontre et leur combat commun sont racontés en détails.
Les traductions du livre
Le livre Au Bord de l'eau a été traduit dans de nombreuses langues. L'une des premières traductions en anglais fut celle de la célèbre américaine Pearl S.Buck.
La version la plus appréciée des Chinois a été traduite intégralement en français par Jacques DARS (Gallimard dans la Pléiade)
Est-il vraiment nécessaire de "chinoiser" pour savoir quelle est LA Forme, La Vraie, la seule?
En réalité, peu importe, il n’y en a pas ! 85, 88, 103,108... Les styles sont nombreux, les écoles variées, les formes multiples, des longues, des courtes, des lentes, des rapides… Que l'on déroule une forme courte en 8 mouvements ou une forme plus longue, le principe fondamental est identique. Et c’est bien ça qui compte !
L'enchainement est un tout, un univers à lui tout seul, un petit monde parallèle, ici, maintenant et... hors du temps. Au début, il n'y a rien, puis il y a le mouvement, puis on revient à son point de départ et à la fin, il n'y a plus rien de nouveau. C'est un cercle parfait. C'est l'image d'une vie.
Un enchainement est un ensemble de mouvements qui n'en forment qu'un seul (Enfin, après quelques heures de vol tout de même!)
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Chaque mouvement possède bien un début et une fin, une phase préparatoire et un aboutissement et pourtant ces mouvements sont si liés, si finement reliés les uns aux autres, comme les perles d'un collier sur un fil invisible... que l’on a l’impression qu’il n’y en a qu’un seul.
C'est toute une technique que d'enfiler des perles! Il y a l'art et la manière...
Pour que le collier soit beau, on ne peut mélanger les grosses perles aux petites:
Pour un enchainement harmonieux selon les principes de notre école, le pratiquant reste toujours au même niveau, pas de fonction "yoyo"(même si dans la vie, il y a des hauts et des bas, dans la forme règne une belle uniformité). Si les jambes ne sont pas encore assez solides, on ne descend pas trop bas pour pouvoir conserver le même fléchissement tout le temps de l'enchainement (ce qui permet aussi d’être relax et de ne pas avoir à se demander quand est-ce qu’on va pouvoir se « relever »).
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Le fil du collier est bien rempli, on ne laisse pas d'espace entre les perles, on ne crée pas de vide entre chacun des mouvements, pas de coup d’arrêt intempestif, un mouvement se fond dans l'autre, dans la douceur de la transformation, on ne marque pas de coupure entre les différents mouvements. La respiration fait le lien. La circulation énergétique renforce le fil invisible qui maintient le tout.
Ce collier-là n'apprécie pas les perles multicolores, il préfère les nuances d'une même teinte, un rythme constant, homogène. Chaque perle est unique et se fond pourtant dans le tout.
Allez, on suit, on ne perd pas le fil... On ne roule pas sur les perles...
L'artisan est concentré sur son travail, donc il ne prend pas n'importe quelle perle tout en discutant avec son voisin de gauche ou en regardant ce que fait le voisin de droite (ou l'inverse, au choix...), son esprit est tout entier tourné vers son activité.
Et enfin, pour poser le fermoir, pas de précipitation, il n'y a pas d'urgence, on ne fait pas le nœud n’importe comment. On prend son temps jusqu'au bout!
Il est agréable de se détendre et de venir pratiquer à heures fixes une ou deux fois par semaine. Mais, le Tai Ji Quan, ce n’est pas seulement un loisir, ce n'est pas qu'une pratique ponctuelle, cela peut devenir un art de vivre différemment, et sans doute bien mieux. Car une de ses premières leçons, c’est de nous apprendre à prendre le temps : il faut être patient, tranquille et concentré pour apprendre une forme.
Prenez plus souvent le temps de vivre et d'observer autour de vous. Redécouvrez les choses sans importance qui donne au quotidien une autre dimension (troisième et quatrième?👽).
Le matin:
Il faut se lever, et ce moment est difficile pour certains! Prenez letemps d'ouvrir les yeux, de vous étirer comme le font les chats (qui eux sont par nature d'une zénitude parfaite!) et ne foncez pas les yeux encore fermés et les articulations endolories sur votre tasse de café!
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Vos yeux ouverts peuvent même aller jusqu'à regarder par la fenêtre et regarder le jour se lever (lui aussi). Bon, c'est d'accord, en hiver il fait encore nuit quand on se met debout! Mais l'idée est prendre le temps de reprendre pied dans la (dure?)réalité.
Suggestion de Xiao Long: prévoir un poster dans la cuisine avec vue sur la nature!
Alors, je vous entends déjà, « Je n’ai pas le temps, je dois faire vite, m’occuper des enfants, aller au boulot, faire les courses, aller là ou là bas… ». Et les retraités super-occupés vont dire : « J’ai poterie à 10h, patchwork à 11h et puis après midi rando… » 🙄
C’est vrai que les journées sont remplies, mais… prendre cinq minutes rien que pour soi au lever va donner le ton à votre journée et peut-être vous aider à prendre les choses plus sereinement.
Les pausesde matinée, du midi ou d'après midi, peuvent être de vraies pauses si on choisit de se mettre un peu au calme pour faire quelques mouvements simples de Tai Ji Quan (n'apportez pas votre épée, ce sera plus discret...) ou si l'on prend un peu de temps pour soi, pour méditer tranquillement.
Cela demande un effort au début, il faut se mettre un peu à l'écart des autres parfois, rompre avec le rythme de la journée. Mais c'est justement cette cassure qui va nous permettre de nous "régénérer". C’est beaucoup plus reposant que de se laisser aller à des discussions sur la marche inexorable du monde (qui n’est plus ce qu’il était, ma brave dame !)
Le soir, il est important avant d'aller se coucher de décompresser, d'arrêter de penser à ce qui aurait pu être, à ce qu’on aurait dû faire ou dire, ou à ce qui sera. On est juste ici, maintenant. Il faut se poser intérieurement et physiquement.
Et pourquoi ne pas passer en revue les instants agréables de cette journée. Il y en a… il faut juste les retrouver et pour cela apprendre à apprécier les petits moments positifs.
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Tout au long de la journée vous avez le choix entre vous énerver, vous laisser contrarier, exaspérer par un feu rouge, un piéton trop lent, un serveur occupé ailleurs, un collègue trop bavard, un travail inintéressant, une caissière inefficace... ou réagir positivement et vous dire que si vous explosez, rien n'ira plus vite ou mieux pour autant.
Et pour patienter, visualisez quelques mouvements de Tai Ji Quan. Concentrez vous sur le moment présent, calmez vos impatiences, res-pi-rez!
Pensez à cette maxime bouddhiste:
"Ne laissez pas les autres marcher dans votre esprit propre avec leurs pieds sales".
(Xiao Long n'est pas à cours de conseils, pourtant je l'ai déjà vu trrrès énervé! C'est sans doute l'exception, celle qui permet de confirmer la règle...)
La méditation assise et silencieuse est celle que préfèrent les Français, paraît-il. Peut-être pourriez-vous utiliser un peu de votre temps libre (ou pas… après tout le temps libre est bien celui que l’on se libère…) pour tester cette forme de recentrage agréable.
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Il suffit de se poser, de s’asseoir confortablement (inutile d’essayer de se faire des nœuds dans les jambes avec des « Aie ! » et des «Ouah ! » pour ressembler à un yogi « pro »), il faut être à l’aise :
On peut s’asseoir sur le sol, sur un tapis, un zafu, un gros pouf, ou sur une chaise (pas un canapé, tout de même !), dos et nuque à la verticale. Si vous êtes assis sur un siège, tenez-vous droit, sans contact avec le dossier de votre siège, et les pieds à plat sur le sol, jambes à angle droit (et non repliées sous la chaise ou chevilles croisées).
Peu importe la hauteur de l’assise, il faut être bien pour se détendre. Si la position est contrainte ou inconfortable, ce sera contre productif puisque la détente ne pourra pas s’installer… autant aller faire autre chose !
Si vous êtes au sol, ancrez-vous bien dans la terre, laissez tomber les genoux : l’idéal est que les genoux soient posés au sol. Deux solutions, ou bien on est « hypersouple » et ils descendent tout seuls ou… pas. Dans ce cas, on choisira un coussin ou zafu assez haut, épais pour soulager les hanches et nous aider à libérer les genoux.
On peut aussi placer un plaid sur les jambes ou les épaules éventuellement pour que ce soit chaud et confortable. On peut rester ainsi 10, 20 30 ou 40 minutes. Soyons modeste pour commencer…
Fermez les yeux, respirez normalement. Restez autant que possible immobile, ne modifiez votre posture que si c'est absolument nécessaire, et faites-le alors en douceur, sans mouvement brusque. Concentrez-vous sur le mouvement du ventre, à chaque inspiration et expiration.
Au bout de quelque temps votre attention sera sollicitée par d’autres choses, lorsque cela se présente, laisser aller votre attention vers ce bruit, cette odeur, cette pensée, examinez la chose, faites-en le tour et revenez à votre respiration.
Il ne faut pas s’en vouloir de s’être laissé distraire un moment de sa respiration, on reste vigilant, on suit, on accepte ce qui passe, on est présent puis on revient au souffle.
Si la posture assise est difficile pour vous, pourquoi ne pas commencer allongé… l’essentiel est de commencer… (sans s’endormir si possible… encore que : quelle meilleure preuve de relation que de piquer un petit roupillon ?)
Facile donc ! : il n’y a qu’à se poser… Le plus difficile : se poser !
" Zhuāngzǐrêva qu'il était papillon, voletant, heureux de son sort, ne sachant pas qu'il était Zhuāngzǐ .
Il se réveilla soudain et s'aperçut qu'il était Zhuāngzǐ.
Il ne savait plus s'il était Zhuāngzǐqui venait de rêver qu'il était papillon ou s'il était un papillon qui rêvait qu'il était Zhuāngzǐ."
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Ce "rêve" de Zhuāngzǐ ( 莊子 ) , date du IVème siècle avant notre ère et fait partie d'un recueil de contes allégoriques qui contient tout l'esprit du Tao. Ce texte est à la fois philosophique et littéraire et influencera nombre d’écrivains et dramaturges.
On ne sait que peu de choses sur cet homme qui vivait à l'époque des Royaumes Combattants (476 à 221 av. J.-C.).
Originaire peut-être du district de l’état de Chu, il occupera une place de petit fonctionnaire avant de se retirer du monde. Comme cela est le cas pour bien d’autres penseurs, certains doutent de son existence… Toujours est-il que le texte est là ! Et pour nous, c'est ce qui compte...
Son œuvre est un des Classiques fondamentaux de la pensée chinoise. Il invite l'Homme au wu wei, un non-agir qui ne signifie pas passivité, mais plutôt conformité de l'action à la nature des choses et des êtres.
"Le rêve du papillon" est sans doute le passage le plus connu du Zhuangzi et pose la question de la nature de la réalité...
Si vous voulez butiner plus, il vous suffit de voleter tranquillement, de vous poser chez votre libraire et de chercher "Le rêve du papillon", de Tchouang Tseu (et oui, une autre transcription!!!), aux éditions Albin Michel, collection "spiritualités vivantes".
Ce blog est a but non commercial, non lucratif. Il délivre des informations et des commentaires techniques et culturels pour les pratiquants de Tai Ji Quan et de Qi Gong ainsi que pour tous ceux qui s’intéressent à la culture asiatique.
Si vous voulez pratiquer le Tai Ji Quan ou le Qi Gong, allez sur le site de l'association Feng yu Long où vous trouverez toutes les informations nécessaires.