Voilà que Zhu Xiao Di a repris le flambeau : Van Gulik – disparu depuis plus de 40 ans à présent- avait su avec brio rendre vie au
juge Ti, ce magistrat chinois du VIIème siècle. Nous découvrions ses enquêtes bien menées ainsi que la société chinoise sous les Tang.
L’auteur des « Nouvelles affaires du Juge Ti », Zhu Xiao Di, est un sino-américain, né à Nanjing,
aujourd’hui professeur à Harvard… Grâce à lui nous retrouvons notre juge Ti dans le district de Pou Yang où il fait bon vivre. Robe de brocart vert, coiffe empesée, longue barbe noire (rien à
voir avec le pirate du même nom !), intraitable, il fait régner la justice et sidère la population et ses proches par ses facultés de déduction hors du commun.
Aucun casse-tête (chinois bien sûr !) ne lui résiste et ce virtuose peut même régler une affaire sans se déplacer tant ses « petites cellules grises » sont performantes : cet Hercule Poirot (héros de nombreux romans d’Agatha Christie) de Pou Yang est étonnant.
Il y a une parenté entre ce grand juge à longue barbe et ce petit belge à fines moustaches, même si Ti adore le thé –et pas n’importe lequel : les Jeunes Pousses Duveteuses de la Province de Anhui- et si Poirot préfère sa tisane (à chacun son addiction…). Autre point commun entre ces 2 personnages : ce n’est pas la modestie qui les étouffe et le juge Ti doit s’attendre à quelques tapes sur les doigts…
Incroyablement clairvoyant, il admire Confucius, se sent naturellement proche du taoïsme et cherche à mieux comprendre le bouddhisme.
Ce roman est constitué de dix nouvelles. Au fil de la lecture, on constate qu’elles sont reliées entre elles, on y voit l’évolution des personnages proche du juge, ses trois
femmes, ses deux aides au tribunal… les situations changent aussi et, n’étant pas suffisamment diplomate, l’étalage de ses facultés de raisonnement finira par conduire le juge Ti sur les
routes : il sera muté dans les terres sauvages de Lan Fang.
Ce roman a été publié en 2010 et Zhu Xiao Di est bien digne de son prédécesseur. Ces nouvelles rendent très vivant ce juge incorruptible, conscient du rôle qu’il a à jouer dans cette société imprégnée de confucianisme, et profondément humain dans ses décisions. Les énigmes qu’il résout nous semblent encore plus proches de celles qui nous ont été transmises par la littérature chinoise.
Il semble qu’aucune suite ne soit envisagée… – dommage !
Le juge Ti, inspiré de Di Renjie (630-700), reste un personnage très prisé en Chine, mis à l’honneur dans de nombreuses séries et films (dont « Detective Dee » en 2010 de Tsui Hark). Di fut un des personnages les plus célèbres du règne de l’Impératrice Wu Zetian, réputé pour son efficacité, son honnêteté.
Un autre auteur s'est intéressé à notre juge : Frédéric Lenormand… Xiao Long n’a pas encore tâté de ses productions… et ne se prononcera donc pas (encore) sur le sujet.