On parle dans la tradition chinoise de trois champs de cinabre (Dantian), qu’on met en relation avec la trinité taoïste Terre, Homme, Ciel.
Le champ de cinabre inférieur, Xià Dāntián 下丹田, se situerait environ trois doigts sous le nombril, au centre du corps, au niveau du point Qihai 气海. Il correspond à la Terre. C'est le Dantian dont nous parlons le plus, c'est vers lui que nous ramenons l'énergie en fin d'exercice.
Le champ de cinabre médian, Zhōng Dāntián中丹田, se situerait dans la poitrine, au niveau du plexus solaire ou entre les seins, au niveau du point Shanzhong 膻中. Il correspond à l’Homme.
Le champ de cinabre supérieur Shàng Dāntián上丹田se situerait dans le crâne, au niveau du point Yintang 印堂 entre les sourcils. Il correspond au Ciel.
Il est à noter que selon les pratiques de qi gong ou de méditation ou d'acupuncture, ces zones "fluctuent"... D'ailleurs,les médecins chinois n’étudient pas les champs de cinabre et ne les utilisent pas dans leur pratique.
Certains utilisent même le nombre d’or pour situer les trois Dāntián. Ils situent le champ de cinabre inférieur à 0, 618 de la longueur du corps, le champ de cinabre médian à 0,618 de la longueur du torse, et le champ de cinabre supérieur à 0,618 de la longueur de la tête. Allez, tous à vos mètres de couturière...
Le cinabre (dan丹),
aussi appelé « sang de dragon », ou « dragon rouge » est un terme provenant de l’alchimie. Il s’agit de sulfure de
mercure. Dans son Histoire Naturelle, Pline l’appelle « Cinabre des Indes ».
Au IVème siècle avant notre ère, le taoïsme qui se développe, rassemble les connaissances cosmologiques, initiatiques et magico-techniques des confréries de forgerons. Grâce au cinabre les alchimistes taoïstes peuvent extraire l'or du minerai et en produire de plus importantes quantités que par l'orpaillage qui était jusque là le seul moyen connu de produire ce métal précieux.
On cherche par la même occasion à transformer ce cinabre pour obtenir une « pilule d’immortalité » ou un élixir de longue vie.
Sous les Han (206 av. J.-C. - 220 ap. J-C.), plusieurs seigneurs se seraient empoisonnés grâce aux
fameuses pilules d’immortalité fournies par leurs alchimistes. On en vient ainsi peu à peu à utiliser le vocabulaire de l’alchimie externe (waidan 外丹, « cinabre externe ») pour qualifier des pratiques alliant travail du corps et de l’esprit (gymnastique taoïste, Qi Gong, méditation...), relevant alors d’une
alchimie interne (neidan内丹, en fait « cinabre interne ») sans aucun doute moins "toxique".
Dans l’alchimie interne, ce sont l'esprit, le souffle et l'essence (shen qi jing 神 氣 精) qui sont utilisés comme matériaux pour accéder à l’immortalité.
Il semble que le terme neidan apparaisse pour la première fois dans les Techniques respiratoires du maître de l’épée mystique (靈劍子•服氣訣) de Xu Xun (許遜) sous les Jin orientaux (265-420).
A cette époque, Ge Hong (283-343), un fonctionnaire intéressé par le taoïsme, le confucianisme, la stratégie, les arts militaires et les pratiques taoïstes visant à l’immortalité physique, écrit le Traité ésotérique et exotérique du Maître qui embrasse la Simplicité (Baopuzi neipian et Baopuzi waipian).
Il pense que l'immortalité physique est accessible à tous. Il suffit de comprendre les lois de la nature et de les suivre.
A la fin de la dynastie Tang (618-907), l’alchimie interne semble avoir pris le pas sur l’alchimie externe dans la recherche de l’immortalité.
Comment ça marche?
L’alchimie interne utilise les « trois trésors » (sanbao 三寶) que sont l’essence (jing 精), le souffle (qi 氣) et l’esprit (shen 神) dans sa recherche de l’élixir de longue vie.
Dans le champ de cinabre inférieur, l’essence est raffinée et transformée en souffle. Dans le champ de cinabre médian, le souffle est raffiné et transformé en énergie spirituelle. Dans le champ de cinabre supérieur, l’énergie spirituelle est raffinée et réintégrée à la vacuité, le Tao.
Première étape: l’essence s’accumule dans le bas-ventre et remonte vers le sommet de la tête en empruntant le méridien Dumai督脉, Vaisseau Gouverneur (dos). Puis l’essence redescend par le méridien Renmai 任脉, Vaisseau Conception (devant). Cette circulation transforme l’essence en souffle et dans le ventre se forme le "cinabre", comparé à une goutte de rosée, une "perle" formée de souffles yin et yang.
Etape 2: Dans le champ de cinabre médian, la perle de lumière devient un embryon de souffle qu’on entretient afin de le transformer en énergie spirituelle. La révolution de l’essence et du souffle continue naturellement, sans être aidée par des exercices de visualisation et de respiration comme dans la première étape.
Etape 3: l'énergie spirituelle naît dans la tête, et peut sortir du corps ou y entrer par la fontanelle, suivant la volonté de l’adepte. Cet "enfant de lumière" est entretenu par des moyens spirituels pour être intégré à la vacuité, le Tao.
En savoir plus:
Le cinabre est utilisé depuis... bien longtemps (il y a 3600 ans déjà on teintait les poteries chinoises et l'encre grâce au cinabre!). Le cinabre toujours très présent est encore utilisé sous forme de pâte pour signer, entre autres les dessins ou peintures
chinoises...
On utilisait aussi le cinabre dans la composition de remèdes et... on l'utilise encore en homéopathie (à petite doses?)
Serge 27/05/2015 11:52
Xiao Long 28/05/2015 14:47