Le Dao Yin Yang Shen Gong est une pratique très particulière, assez peu connue encore en France. Et nous pouvons nous poser la question de savoir si cette pratique se rapproche plus du Qi Gong ou du Tai Ji Quan, en particulier pour les formes en armes…
Le plus souvent, on vous dit que le Qi Gong n’est pas martial - mais énergétique et que le Tai Ji Quan est martial et - pas énergétique… C’est une façon de faire une réponse rapide, mais cela ne signifie pas que cette réponse soit satisfaisante.
Le Tai Ji Quan « classique », traditionnel, a une dimension martiale forte. Nous sommes dans l’attaque/défense. On peut partir du principe que c’est cette dimension martiale qui prime, l’action se ferait de l’intérieur vers l’extérieur, la posture est assez compacte, le poids du corps est placé plutôt au centre pour plus de disponibilité. Cependant, il n'y a pas seulement un aspect martial dans cette discipline. L’aspect énergétique est bien présent. Les écoles les plus récentes ont élargi la posture, le poids du corps oscille nettement entre l’avant et l’arrière, l’aspect énergétique est plus perceptible.
De la même façon, on ne peut affirmer que le Qi Gong soit purement énergétique : que faire alors de ces moines, qui après un gros travail de concentration se frappent la tête avec une plaque de métal. N’oublions pas que dans le yin yang les poissons ont des yeux : le poisson noir montre son œil blanc et le poisson blanc son œil noir. Si tout est transformation, on ne peut trancher nettement et décide que tout est noir ou bien que tout est blanc. L’énergétique est à la base de toute pratique martiale – ou devrait l’être… Mais souvent cet aspect est un peu oublié.
Le Yang Sheng Tai Ji ressemble, vu de l’extérieur au Tai Ji Quan, que nous connaissons, mais il a son propre caractère. L’idée fondamentale des enchaînements est le Yang Sheng, c’est-à-dire « le nourrir la vie ». Ainsi, même les formes exécutées avec une arme, un sabre, une épée, un éventail, sont des formes qui se rapprocheraient pour nous presque plus du Qi Gong que nous connaissons que du Tai Ji Quan tel que nous le connaissons par les formes de style Yang que nous pratiquons.
Pour Maitre Zhang Jian, neveu de Maitre Zhang Guang De, le Tai Ji Quan est plus « mou ». Petit Dragon fronce le nez un peu lorsqu’il entend Wakalin décrire le pratiquant de Tai Ji Quan, poitrine fermée et molasson… mais cette image est utilisée pour mettre en relief sa différence avec la pratique de l’école Dao Yin Yang Sheng Gong. Le Yang Sheng Tai Ji travaille sur l’extrême tension et le relâché.
Maitre Zhang Jian insiste sur les différences entre le Dao Yin Yang Sheng Gong et le Tai Ji Quan ou le Qi Gong classique (entendez, Qi Gong santé).
Le DYYSG est un Dao Yin GONG, dit-il : c’est dans le mouvement que l’on recherche le calme. Pour lui le Qi Gong classique part du calme et va vers le mouvement, il y a un côté méditatif, statique au départ. On est dans la détente, le calme à 100%. Le Dao Yin GONG nous permet d’atteindre calme par la pratique.
Le DYYSG demande de la force (Yong Li) qui alterne avec la détente (Fan Song), une détente concentrée (Yi Nian).
Le travail est l’idée maîtresse, ce n’est qu’en travaillant que l’on peut améliorer l’état de notre corps et de notre esprit. Nous devons faire un effort.
Cette idée d’effort peut nous sembler étrange, car on nous présente ces disciplines comme une relaxation permanente. Mais que serait la détente s’il n’y avait pas de travail ?
On voit dans ces explications la volonté de démarquer cette école particulière, qui pour Xiao Long est comme un point d’équilibre entre Tai Ji Quan et Qi Gong.
On peut se demander si, comme dans bien d’autres domaines, nous ne sommes pas tout simplement tentés de mettre des choses dans des cases bien définies, comme si aucun échange n’était possible, alors que le contour de ces cases n’est pas linéaire.
Lors d’un entretien, le Petit Dragon avait posé la question à Maître Zhang Guang De de savoir si les méthodes avec armes ou de paume (Zhang 1 ou 2 ou 3) qu’il avait créées étaient des Qi Gong ?
Et sa réponse avait laissé le Petit Dragon bien méditatif :
« Tout dépend de l’état d’esprit lors de la pratique. »
Voilà qui ouvre de nouveaux horizons et nous fait comprendre que les frontières, c’est nous qui les élevons. Sans doute sont-elles beaucoup plus perméables qu’on ne pourrait l’imaginer.
Dans les enchaînements, nous retrouvons bien des points communs avec les techniques que nous utilisons dans notre pratique habituelle de style Yang. Certaines positions pourtant, sont très spécifiques. Ce sont en général des positions assez difficiles, pensées pour renforcer le corps.
Par exemple, la position racine, très fréquente, qui permet de renforcer les jambes tout en travaillant sur de nombreux points (sur Yong Quan, sur les points Jing et les points Yuan des membres inférieurs…)
De même, nous retrouvons plus souvent que dans nos enchaînements habituels, la position du cavalier qui devrait se faire avec les genoux et les pieds bien parallèles et le dos bien vertical. C’est le coccyx qui descend vers le sol comme pour s’asseoir pour bien stimuler les jambes.
Ces positions sont loin d’être confortables… mais, ce n’est pas le but.
Certains mouvements sont très caractéristiques et pourraient se résumer en un mot : la vrille.
Les avant-bras ou les bras tournaient vrille permettent de stimuler les points Jing et les points Yuan des membres supérieurs tout en stimulant la circulation du sang et travailler la souplesse des articulations. Tourner augmente l’amplitude du mouvement et la force déployée augmente par la torsion, le travail est plus complet, plus profond.
On parle d’essorage et l’image est très parlante.
C’est comme si notre corps et nos membres étaient un linge mouillé dont on voudrait faire sortir l’eau en le tordant. C’est ce travail en souplesse dans la continuité qui nourrit le corps et calme l’esprit. En cela, cette pratique s’oppose aux « sports » qui, plus raides, plus extrêmes, peuvent nuire au corps.
Les mouvements de torsion du buste sont fréquents, de même que les mouvements d’extension en arrière ou ceux où l’on se penche vers l’avant pour stimuler la circulation dans Ren et Du et faire communiquer Ming Men et Shen Que afin que s’harmonise Yin et Yang et pour produire de l’énergie pour nourrir Yuan Qi.
Le travail est partout: on garde les genoux serrés, les pieds collés quand ils sont joints pour garder l’énergie dans le centre. Pour cette raison aussi, les pieds ne sont jamais tournés vers l’extérieur, ils sont parallèles dans les positions pieds écartés. De plus on stimule les points sur les méridiens qui passent à l’intérieur du genou et des jambes.
On comprend pourquoi la méthode du professeur ZHANG Guang De est répandue en Chine et dans le monde. La méthode repose sur les mouvements traditionnels du Dao Yin (conduire l’énergie par le mouvement), élaborés et assemblés selon les règles de la médecine traditionnelle chinoise. Par son travail, chaque individu peut améliorer sa situation physique et mentale.
Il ne nous reste plus qu’à nous mettre au boulot !
Bon courage !