Il n’est pas rare de rencontrer ce nom « oiseau Peng » dans les dénominations de certains mouvements de Qi Gong. Xiao long, le Petit Dragon curieux est parti sur la piste de l’animal pour en savoir plus !
Le « Peng » (鵬) ou « Da Peng » (大鵬) est un rapace mythique –on s’en serait douté- chinois qui serait issu de la transformation d’un poisson géant, appelé « Kun » (鯤). On ne fait pas dans la demie mesure…
« Peng » et « Kun ».
Peng 鵬 combine le caractère « oiseau » 鳥 avec un autre 朋 qui se prononce Peng et que l’on retrouve dans ami (Peng You). Peng (鵬) était anciennement une variante du caractère chinois « Feng » 鳳 « Phénix ». Voilà donc pour le volatile !
« Kun » combine le radical « poisson » 魚 avec un « Kun » 昆 qui signifie descendance; insectes. Kun (鲲) signifiait à l’origine, œufs de poisson ou alevins.
« L’oiseau Peng déploie ses ailes » (大鵬展翅).
Dans la littérature chinoise, on retrouve les plus anciennes mentions sur le mythe du Peng et du Kun
dans le « Zhuang Zi » (莊子), un Classique Taoïste qui porte le nom de son auteur. Il est dit alors:
Dans la Mer du Nord, il est un poisson.
Son nom est Kun.
La taille de Kun s'étend sur
On ne sait combien de milliers de lieues.
Il se transforme en oiseau.
Son nom est Peng.
L'envergure de Peng s'entend sur
On ne sait combien de milliers de lieues.
Il s'élance et s’envole,
Les ailes comme des nuages suspendus au ciel.
Cet oiseau, quand l'océan commencera à se soulever,
Voyagera jusqu'à la Mer du Sud
La Mer du Sud – l'étang céleste.
L’énigme :
Il y a une énigme...
Zhuang Zi sait bien utiliser les métaphores. Cette histoire a un sens et on peut interpréter cette transformation, par exemple, comme une transformation de l’esprit ou de l’âme…
Le Kun représente notre esprit/âme dans son état initial. C’est un énorme poisson qui nage dans la Mer Nordique. Il y fait froid et sombre, et Kun, un peu lourdaud, erre dans les profondeurs glauques à l’aveuglette, tournant en rond comme un vulgaire poisson rouge dans son bocal… Bref, c’est du tout nous, noyés dans les banalités du quotidien et englués dans nos petits soucis… Mais il existe un monde bien plus vaste, un « au-delà de l’eau », un ciel immense qui nous tend les bras (si je puis dire !) …
Le gros poisson Kun un jour se transforme et abandonne son univers marin. (Il en a assez de « mariner » là !).
C’est sans doute un premier pas sur la Voie du Tao. Kun était prêt, il cherchait quelque chose de plus grand, ses écailles deviennent autant de plumes, ses nageoires deviennent des ailes… L’esprit/âme atteint sa maturité et Peng peut s’envoler vers la Mer du Sud, la chaleur, la lumière. Commence un voyage vers ce qui pourrait être développement spirituel, réalisation personnelle… Rien ne peut désormais arrêter Peng, il vole, toujours plus haut et rien ne le fera replonger dans des eaux troubles. Peng est libre, sans contraintes. Les perspectives changent, le « monde en bas » s’éloigne, rapetisse. Peng prend de la distance et peut enfin exploiter son potentiel…
La Nature :
Ce texte nous montre une de fois de plus combien la Nature est forte et intelligente. Rien à voir avec le monde d’humains noyés dans le quotidien. Dans la Nature, tout se transforme et si nous suivons son modèle comme le Tao nous y engage, alors nous nous transformerons aussi, lorsque nous serons prêts, spontanément. Car rien ne peut brusquer le cours des choses, le flux de la vie.
Bref, nous, petits poissons, pouvons à notre heure nous métamorphoser en beau Peng…